Actualités — 18 janvier 2015

Depuis la rentrée 2014, tout étudiant peut se lancer dans un projet de création d’entreprise. Une façon de réconcilier monde étudiant et monde du travail, et d’encourager les futurs promus à créer leur emploi.

«Donner les chances de créer les champions industriels de demain, sur le modèle d’entreprises mondiales comme Facebook, Apple, Google, nées dans les facs américaines», c’est avec cette ambition que le Gouvernement a confirmé, à la rentrée 2014, la mise en place du statut national d’étudiant entrepreneur. Objectif à l’horizon 2018: 20 000 créations d’entreprise ou reprises d’activité par des étudiants. Cependant, dans un communiqué en date du 18 septembre 2014, Les Moineaux (mouvement dédié à la parole des jeunes entrepreneurs) dénoncent une mesure «largement insuffisante pour faire émerger un Zuckerberg à la française». Ainsi, Les Moineaux proposent depuis longtemps d’ajouter une option «entrepreneuriat» au prêt étudiant, afin de prolonger le prêt aux mêmes conditions avantageuses, dans le but de financer une création d’entreprise. Entretien avec Benjamin Suchar, membre fondateur des Moineaux et fondateur de Yoopies – première plateforme sociale de baby sitting – et CheckMyMetro.

Factotum: Le chômage touche de nombreux jeunes. L’aventure entrepreneuriale séduit-elle de ce fait de plus en plus d’étudiants?

Benjamin Suchar: Je pense que face à la crise, l’entrepreneuriat est une vraie opportunité, avec de nombreux exemples à suivre. La sortie ou la fin d’études est une période charnière pour développer un projet, car il y a moins de risques. Il n’y a ni famille à assumer, ni carrière professionnelle à mettre entre parenthèses. L’échec, s’il a lieu, est tout relatif: l’étudiant se retrouve au même niveau que ses camarades à rechercher un emploi, mais avec une expérience valorisante.

Les facs et les écoles communiquent-elles suffisamment sur le statut?

…ça dépend. Jusqu’à présent, l’entrepreneuriat était réservé à une certaine «élite», et son discours s’adressait aux écoles de commerce, parfois aux écoles d’ingénieurs. Il faut souligner le fait qu’entreprendre s’adresse à toutes les disciplines, et que rien n’empêche un étudiant en sciences sociales, en médecine ou en anthropologie de se lancer dans l’aventure. C’est d’ailleurs le cas chez les étudiants Outre-Atlantique. Le statut d’étudiant-entrepreneur offre désormais un cadre juridique, qui faisait cruellement défaut. Il est donc essentiel de communiquer sur son existence au-delà des frontières traditionnelles de la formation professionnelle.

Qui sont ces 3% d’étudiants-entrepreneurs?

Jusqu’à la création du statut, leur origine était sclérosée: il s’agissait d’étudiants ingénieurs ou en écoles de commerce. Leur milieu social était favorisé, car il fallait financer les deux premières années d’activité de l’entreprise. L’objectif de créer un statut d’étudiant-entrepreneur est justement de permettre de meilleurs financements, non pas de l’entreprise, mais du coût de la vie étudiante. Les étudiants-entrepreneurs sont encore très majoritairement masculins, mais les mentalités évoluent. Il y a aujourd’hui dans le monde de l’entreprise une diversité dans les équipes, et un grand nombre de services s’adresse aux femmes.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées en créant vos deux entreprises?

Au niveau de l’adminsitratif, il y a ce que j’appelle «la double peine»: l’obligation de cotiser à la fois pour la sécurité sociale étudiante et pour le RSI (régime social des indépendants). Cotisations pouvant aller jusqu’à 2000 euros, sans même réaliser 1 euro de chiffre d’affaires. C’est très pénalisant…Il y a aussi le multiplicité et la complexité des démarches administratives quand on se lance. Vient ensuite la difficulté à embaucher quand on crée son entreprise, par manque de flexibilité. Enfin, l’isolement. Mais j’ai réussi à m’entourer, c’est essentiel pour mener son projet.

Aujourd’hui, 26 Pôles Etudiants pour l’Innovation, le Transfert et l’Entrepreneuriat ont vu le jour en France. Est-ce suffisant?

Ces Pôles manquent encore de moyens, et doivent fournir un effort de communication et de pédagogie. Ils doivent aussi favoriser la cohabitation entre partenaires publics et privés, ces derniers étant encore trop absents. L’idée est de désenclaver tous les incubateurs et de regrouper les compétences, par le biais d’un intranet, par exemple.

Quels conseils pratiques donner à celles et ceux qui se lancent dans l’aventure?

N’attendez pas que l’idée tombe du ciel. C’est comme en cuisine: vous pouvez avoir sous la main les bons ingrédients, mais qu’allez-vous en faire? Parlez, échangez avec un maximum de personnes et en dehors du milieu étudiant: ce sont vos futurs clients, vos futurs fournisseurs. En vous imprégnant des idées des autres, vous ferez évoluer votre projet.

Contacts Facebook Les Moineaux et ben@yoopies.fr

 

Etudiant et entrepreneur, comment ça marche?

Le statut national d’étudiant entrepreneur permet aux étudiant(e)s et aux jeunes diplômé(e)s d’élaborer un projet entrepreneurial dans un PEPITE (Pôle étudiant pour l’Innovation, le Transfert et l’Entrepreneuriat). Le diplôme d’établissement «étudiant entrepreneur» (D2E) accompagne le statut d’étudiant entrepreneur: il permet de mener à bien son projet avec un maximum de sécurité et de visibilité.

  • Il s’adresse en priorité aux jeunes de moins de 28 ans, âge limite pour bénéficier du statut social d’étudiant.
  • Le baccalauréat ou l’équivalence en niveau est la seule condition de diplôme requis pour une inscription au diplôme d’établissement étudiant entrepreneur.
  • Les frais légaux d’inscription et spécifiques sont limités à 500 euros par an pour la période 2014-2017
  • Le statut d’étudiant entrepreneur est délivré au regard de la réalité, de la qualité du projet et des qualités du porteur de projet. C’est le comité d’engagement du PEPITE qui est chargé d’instruire les demandes pour le Ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.
  • Le statut permet ainsi d’accéder à des prestations délivrées dans le cadre du PEPITE : un accompagnement par un enseignant et un référent externe, un accès à l’espace de coworking du PEPITE, possibilité de signer un Contrat d’Appui d’Entreprise (CAPE) avec une structure type couveuse ou coopérative d’activité et d’emploi, ou un autre partenaire du PEPITE.

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pierre

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